Les caméras de sacoche - Retrouver le geste créatif

Le terme de caméra de sacoche s'est imposé un peu après nos études en photo (mes proches amis photographes d'amour et moi). Nous commencions à cumuler tranquillement pas vite les quelques contrats qui nous préparaient pour notre carrière et pour la vie de travailleurs autonomes. Une réalité a fait son apparition: « mais là, si c'est ma caméra de job que j'ai en ce moment, je ne souhaite plus vraiment la sortir pour voyager, me promener et faire des trucs plus funky avec! »

On avait peur de briser notre gear.

Et je ne parle pas seulement d'échapper nos caméras et de les endommager physiquement; en effet, chaque déclenchement de nos appareils cause une micro usure de celles-ci et les rapproche chaque jour d'un problème. On a donc tous adopté de nouveaux appareils afin de soulager nos démangeaisons de créer.

Alors, le terme caméra de sacoche fait référence à une caméra que tu peux déposer dans ta sacoche et partir avec. Pickup and Go. Facile d'utilisation, accessible et pas trop grosse.

J'en ai eu quelques-unes dans les dernières années; une Pentax Asahi, une Super Baldax, différents instax, la fuji Xt20, l'application HUJI et plus récemment, une petite découverte de l'été dernier: une Flashback.

La Flashback est horriblement simple. Elle a le même design qu'une caméra jetable, comme celle que l'on achetait à la pharmacie. On crinque et on shoote. Tu peux activer le flash si tu veux et pas besoin de batteries; elle se recharge via USB-C. Pour sortir tes photos, cette caméra déploie son propre réseau wifi et peut se connecter à ton téléphone via une application. Sur cette application, tu peux vider tes photos, elles prendront ensuite un emblématique 24h à se faire "développer". Au bout de cette attente, tu reçois tes images comme une bombe de nostalgie. Pour finir, l'application te propose trois nouveaux "films" pour repartir ton prochain rouleau digital de 27 poses.

Bien entendu, on paie une seule fois pour la caméra. Les films sont la gimmick du système. Ceci n'est pas une publicité; qu'un petit éloge pour ma Flashback. (oui oui. "Éloge" c'est masculin)

J'ai toujours eu un amour pour l'imperfection dans l'image. Le côté instantané et impulsif du geste de photographier est celui qui m'attire le plus dans la pratique. C'est pour ça que ma caméra de sacoche est simple et sans option. Je ne veux plus réfléchir à la lumière, la composition et tous les paramètres qui définissent la justesse d'une scène. Je veux prendre ma caméra et créer le souvenir. Sortir du décorum photographique et contribuer à l'archive de ma propre vie.

Dans mon univers proche, il y a moi et ce que je ne contrôle pas. Ma caméra de sacoche permet l'intersection de ces deux aspects; l'apparition d'une parcelle de familiarité. 

La Flashback a aussi l'avantage d'être minuscule, je peux donc littéralement la mettre dans mes poches et partir avec. Je n'ai aucune bonne raison de sortir de chez moi sans elle. Et en plus, elle look cool en maudit. 

Shooter pour la job

Un autre problème qui s'est imposé en sortant des études était que faire de la photo est vite devenu un geste commercial. En étant photographe, j'ai associé mon appareil à la job et je n'avais plus envie de faire de la photo pour le plaisir de documenter mon quotidien (pourtant c'était ça qui me rendait si heureux quand j'étudiais; je sortais faire des photos, je contactais des gens pour créer, etc.). J'avais laissé le bonheur de créer dans un tiroir pendant trop longtemps. 

C'est avec ces petites caméras simples et bizarres que je reviens aux sources, que je reconnecte avec mon geste créatif premier. Que je souhaite ne plus me casser la tête.

Bref, arrêter de penser pis take the goddamn picture!